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Yves Rasir

Il y a quelques semaines,  un de mes amis papa d’une petite fille sujette à des rhinites chroniques m’a confié que le pédiatre préconisait l’ablation de  ses végétations par un ORL et m’a demandé ce que j’en pensais. La question m’a surpris car je croyais naïvement que cette pratique chirurgicale était révolue et que les manieurs de bistouri ne procédaient plus à ce genre d’ intervention intempestive.  Situées au fond des fosses nasales, les végétations dites adénoïdes ne sont pas considérées comme un organe : il s’agit de muqueuses qui bourgeonnent dans le cavum et peuvent s’hypertrophier en cas d’infections répétées. D’importance secondaire, ces tissus ne sont cependant nullement superflus : leur rôle est de protéger l’organisme contre les intrus viraux et bactériens. Non pas de manière militaire et défensive, laissons cette métaphore à la théorie pasteurienne, mais plutôt de manière douanière : la mission des végétations est d’effectuer un contrôle des particules pénétrant le nez et de les refouler si leur entrée n’est pas souhaitable.

Si ces muqueuses s’enflamment et dysfonctionnent, ce n’est pas à cause de prétendus assaillants extérieurs mais en raison de l’état du terrain intérieur. Les bons naturopathes savent bien qu’il suffit de les sevrer de lait de vache et de réduire les aliments farineux pour que les enfants sujets à ce type de troubles voient leurs symptômes régresser et disparaître progressivement. Les thérapeutes en décodage biologique savent également que les agressions sonores et les mots qui font mal peuvent suffire à déclencher les otites à répétition fragilisant les végétations. Identifier le stress auditif suffit alors à résoudre le problème. Mais pourquoi faire intelligent quand on peut faire bête et alimenter du même coup le business chirurgical ? Loin de moi l’envie de critiquer la chirurgie. Lorsqu’elle répare les traumatismes, reconstruit des corps mutilés, rafistole des cœurs défaillants, arrache des dents mortes, évacue des tumeurs envahissantes ou procède à des amputations vitales, cette branche de la médecine occidentale moderne mérite tous les applaudissements. Ce qui ne va pas, c’est de tailler dans le tas à tour de bras et de négliger l’utilité de ce qui est ôté. L’appel au scalpel devrait être le dernier recours lorsque les autres solutions sont épuisées, et non un réflexe de facilité fondé sur des connaissances obsolètes. Durant ces dernières décennies, la science anatomique a beaucoup progressé et des organes jadis jugés accessoires sont désormais mieux compris et valorisés. Voici quatre de ces organes autrefois méprisés et qu’il faudrait mettre aujourd’hui à l’abri des chirurgiens.

Les amygdales, barrière immunitaire

S’ il y a bien un organe à réhabiliter, c’est celui-là. Situées des deux côtés de la gorge, les amygdales palatines sont au système immunitaire  ce que la barrière est au poste de douane : elles bloquent l’accès par voie buccale aux micro-organismes indésirables. Dans les années 50 et 60, des millions d’enfants ont subi leur ablation sous prétexte de prévenir les angines. J’en ai connu plein chez mes cousins et mes copains  et je les jalousais parce qu’après l’intervention, le seul aliment autorisé pendant plusieurs jours était la crème glacée. Ma jalousie était bien mal placée car on connaît aujourd’hui les conséquences funestes de telles opérations. Selon cette étude de 2018, le retrait des végétations est associé à un risque d’affections respiratoires (asthme, pneumonie et bronchopathie chronique obstructive) multiplié par presque trois. L’amygdalectomie, elle, multiplie par deux le risque de ces mêmes pathologies respiratoires, et par quatre ou cinq le risque d’otite moyenne. Ce n’est pas rien et cela témoigne d’une sévère perte de compétence immunitaire, l’impact de cette immunodéficience acquise étant probablement gravement sous-estimé. Selon plusieurs médecins américains, et notamment le Dr Joseph Mercola, il y  aurait un lien certain entre la mode des ablations des amygdales et l’épidémie de poliomyélite qui a sévi à la même époque. Dans cet article abondamment sourcé, le praticien cite notamment un article du Lancet de 2014 se référant lui-même à un rapport universitaire de Harvard qui, dans les années 1940, a conclu que « les amygdalectomies entraînaient un risque important de paralysie respiratoire due à la poliomyélite bulbaire ». On peut donc sérieusement se demander si la polio, clairement reliée à la toxicité du DDT, n’est pas aussi la rançon d’un saccage chirurgical. Heureusement, ce massacre au bistouri n’a plus cours aujourd’hui. De 68 000 en 2002 en France, le nombre d’interventions s’est stabilisé autour de 35 000 par an chez les moins de 18 ans. Mais c’est encore beaucoup trop, compte tenu des risques encourus.

L’appendice, réserve probiotique

Petit organe en forme de doigt situé à la jonction de l’intestin grêle et du gros intestin, l’appendice connaît un destin semblable à celui des amygdales : longtemps considéré comme inutile, retiré massivement aux enfants au siècle dernier (300.000 opérations par an dans les années 1980), il fait encore l’objet de 60.000 ablations en France chaque année. C’est excessif quand on sait que l’appendicite peut se soigner autrement et que l’appendice est un organe de grand intérêt : c’est un réservoir de « bonnes bactéries » intestinales. Selon les dernières recherches, ce petit étui sert en effet à stocker les souches bactériennes favorables à l’organisme et à les relâcher dans l’intestin en cas de problèmes gastro-intestinaux, une diarrhée par exemple. Comme l’explique le Dr Maurice Bessoudo dans le magazine Plantes et Santé, l’appendice est comme « le disque dur de l’écosystème intestinal », c’est l’outil qui permet de relancer le microbiote après un crash. Or le microbiote, plus personne n’oserait dire le contraire, joue un rôle capital pour la santé globale. Certes, la flore intestinale peut survivre à une appendicectomie, mais sa diversité aurait été garantie par les bactéries conservées dans la réserve. En cas d’appendicite aigüe pouvant dégénérer en péritonite, cette poche doit parfois impérativement être enlevée et l’intervention du chirurgien est alors salutaire. Cependant, les dernières études indiquent que les complications fatales sont très peu fréquentes et que la solution opératoire est rarement la meilleure : une antibiothérapie bien conduite peut avantageusement remplacer la chirurgie, ce qui est assez paradoxal puisque l’abus d’antibiotiques dans l’enfance constitue un facteur de risque de l’appendicite. Celle-ci, faut-il le rappeler ici, ne survient pas par hasard : elle découle d’un conflit à propos d’une chose moche, indigeste, qu’on ne peut pas vider et qui est vécue comme une impasse. La conscientisation du ressenti conflictuel peut à elle seule tempérer la phase inflammatoire – qui est une guérison ! –  et éloigner la nécessité d’opérer.

La vésicule biliaire, alliée de la digestion

La vésicule biliaire est une poche en forme de poire située sous le côté supérieur droit de l’abdomen. Contrairement aux deux organes précédents, elle continue d’être dédaignée puisque c’est l’intervention digestive la plus répandue en France avec 120.000 ablations par an. Lorsqu’on n’a plus de vésicule, les coliques douloureuses s’arrêtent et le risque de lithiase s’éloigne mais la bile est secrétée en permanence, avec  comme conséquence une fatigue digestive et des difficultés à digérer les graisses. La bile a en effet pour principale fonction de participer à la digestion des matières grasses. En temps normal, la vésicule se contracte lors des repas pour se vider de son contenu dans le duodénum : c’est la « chasse » biliaire.  La bile se mélange aux aliments ingérés pour faciliter leur digestion. Les constituants de la bile vont ensuite se fixer sur la cellulose des légumes et des fruits pour être éliminés par les selles, à moins que cette cellulose ne soit absente du fait d’une alimentation carencée en végétaux. L’épaississement de la bile, jusqu’à l’apparition de calculs, peut être la conséquence d’une chasse biliaire incomplète ou d’une production excessive par le foie. Comme l’avait bien perçu les anciens médecins, ce déséquilibre physiologique est naturellement le reflet d’une problématique psychologique :  les personnes au tempérament bilieux  se font trop de bile parce qu’elles accumulent de la colère et du « fiel », ce dernier mot étant d’ailleurs synonyme de bile en vieux français. En Médecine Nouvelle, on parlera plus exactement d’amertume et de rancœur : c’est le conflit de rancœur qui affecte particulièrement la vésicule biliaire. Fin connaisseur des travaux du Dr Hamer,  le Dr Robert Guinée ajoute pour sa part les notions d’injustice et d’humiliation. Ce qui est manifeste, c’est que les problèmes de vésicule guettent ceux qui ressassent les soucis et les contrariétés dans l’aigreur et le ressentiment. Pour éviter d’y former des pierres et de passer sur le billard, ne vaut-il pas mieux cesser de ruminer le passé ? Poser la question, c’est y répondre.

Le thymus, glande anticancer

Le thymus est une glande  située  entre les poumons,  derrière le sternum.  C’est elle qui produit les cellules immunitaires T (globules blancs)  avant la naissance et pendant l’enfance.  Comme elle s’atrophie après la puberté, elle a longtemps été considérée comme un organe non fonctionnel chez l’adulte, c’est pourquoi elle est parfois retirée lors de chirurgies cardiaques pour faciliter l’accès au cœur et aux principaux vaisseaux sanguins. Mais ce qui devient petit n’est pas pour autant insignifiant.  On sait aujourd’hui que la diminution de sa taille tient au fait que les lymphocytes T se perfectionnent et non au besoin d’en produire moins.. Une étude récemment publiée dans le New England Journal of Medicine montre que le thymus est essentiel à la santé des adultes en général, et dans la prévention du cancer en particulier. Les chercheurs américains ont évalué le risque de décès, de cancer et de maladies auto-immunes chez 1146 adultes ayant subi une ablation du thymus au cours d’une intervention chirurgicale et chez 1146 participants ayant subi une chirurgie similaire sans thymectomie. Résultats : cinq ans après l’opération, il y avait deux fois plus de patients ayant développé un cancer dans le groupe des mutilés, et trois fois plus de décès. Ça se comprend aisément car l’étude montre aussi que les personnes orphelines de leur thymus avaient moins de lymphocytes T et plus de cytokines inflammatoires dans le sang. Quand on sape le système immunitaire, on fait forcément le lit du cancer…

Yves Rasir

PS : Pour rédiger cet article, j’ai puisé pas mal d’informations dans le magazine Plantes & Santé (N° 259 de septembre 2024)  qui consacre un dossier aux « organes négligés mais  si précieux ». Je vous invite à vous le procurer car les trois autrices de cette enquête parlent de trois autres organes trop vite sacrifiés sur la table d’opération (surrénales, rate, pancréas) et elles passent en revue les stratégies naturelles (nutrition, phytothérapie, médecine chinoise…) pour les maintenir en bonne santé.

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