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Comment s’y retrouver et faire son choix dans le très vaste univers des médecines et des méthodes thérapeutiques, qu’elles soient conventionnelles ou alternatives ?

Sur quels critères se baser pour accorder sa confiance à telle ou telle approche ?

Y a-t-il moyen de faire un tri des thérapies avant de déléguer sa santé aux thérapeutes qui les pratiquent ?

Peut-on évaluer le sérieux des diverses façons de soigner sans les préjuger ?

En fonction de ses croyances, de ses connaissances et de son expérience, chacun(e) d’entre nous aura ses propres réponses à ces différentes questions. Je ne fais pas exception et je n’ai certainement pas la prétention d’établir un classement des bons et des mauvais traitements, des voies à suivre ou à fuir, des praticiens compétents et des authentiques charlatans. Je laisse ça aux gardiens de la doctrine médicale dominante, aux institutions se targuant d’alerter sur les « dérives sectaires » et aux corporations toujours prêtes à chasser de la sorcière.

Dans cette deuxième lettre du vendredi – la première expédiée par le nouveau propriétaire de la revue Néosanté -, je voudrais simplement partager ma façon personnelle de débroussailler l’épais maquis des disciplines et techniques médico-thérapeutiques. Pour discerner celles qui me semblent dignes d’intérêt et celles qui me paraissent moins recommandables, je chausse des lunettes à foyers multiples et je tiens compte de sept éléments à mes yeux importants.

  • Le caractère traditionnel

En matière de santé et de médecine, je pense d’abord qu’il faut donner tort à la fameuse maxime de Corneille faisant dire au Cid qu’ « aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années. », autrement dit que la jeunesse peut prévaloir sur la maturité et la sagesse de l’âge.

Je pense au contraire que seul le temps permet de juger si telle ou telle école médicale dispense un enseignement pertinent. Si une médecine traverse, non pas quelques décennies ou quelques siècles seulement, mais plusieurs millénaires et qu’elle s’enracine dans l’antiquité ou dans une époque encore plus reculée, c’est à mon sens le signe qu’elle est performante et efficiente. Si elle ne l’était pas, l’Histoire l’aurait reléguée dans ses oubliettes et on n’en parlerait plus.

C’est pourquoi je vois notamment d’un bon œil la médecine traditionnelle chinoise, la médecine tibétaine, la médecine ayurvédique et les différentes pratiques chamaniques issues de l’Amérique latine ou de la Mongolie. Plus une tradition est longue et résiliente, plus elle a de chances de véhiculer des protocoles dont l’efficacité a été empiriquement vérifiée sur des millions de patients. Un remède très ancien ou une technique ancestrale auront mes faveurs par rapport à leurs équivalents plus récents. Par exemple, je me tournerai volontiers vers les plantes et les huiles essentielles, dont l’usage est immémorial, alors que j’accorde moins de crédit aux élixirs floraux et aux granules homéopathiques, d’apparition bien plus tardive.

La médecine que je préfère selon ce critère, c’est évidemment la naturopathie. Bien qu’apparue au 19ème siècle aux États-Unis, cette approche trouve en effet son origine dans la Grèce antique et la médecine hippocratique, comme le démontre la philologue Anne Lagière dans son ouvrage Aux Sources de la Naturopathie. Les premiers naturopathes se sont explicitement revendiqué d’Hippocrate de Cos, considéré à juste titre comme le « père de la médecine » occidentale, et ce sont aujourd’hui les naturopathes qui demeurent véritablement fidèles aux principes et aux préceptes hippocratiques.

Le premier de ceux-ci est bien sûr de ne pas nuire (primum non nocere) au patient en s’abstenant de lui prescrire des médications nocives. Il s’agit ensuite de s’en remettre à la force guérisseuse de la nature et de faire de l’aliment un médicament, c’est-à-dire de se focaliser principalement sur la façon de manger pour retrouver ou améliorer la santé. En tant qu’héritières de cet art millénaire de guérir et de prévenir, la science nutritionnelle et la nutrithérapie (compléments alimentaires) bénéficient de toute ma considération. Ce sont les hautes branches d’une tradition profondément enracinée.

  • Le mode d’action naturel

Comme second critère de tri, j’utilise bien entendu le caractère « bio » des approches thérapeutiques. Sauf cas d’urgence, je ne me fie nullement aux remèdes obtenus par la chimie de synthèse et dont l’action consiste à lutter contre des symptômes ou à occire les micro-organismes opérant dans le corps humain. Exit les antibiotiques, antiviraux, antimycotiques ou antiparasitaires à visée biocidaire.

Tout ce qui est « pro-vie » (par exemple les probiotiques) aura toujours ma préférence par rapport à ce qui lui est hostile, en ce compris les produits naturels à action « bactéricide » ou « virucide ». La naturopathie authentique ne recommande pas ces remèdes qu’elle qualifie de « palliatifs » parce qu’ils s’attaquent aux conséquences et non aux causes du mal. Trop souvent, les naturothérapeutes s’éloignent de la naturopathie en négligeant le terrain, en considérant les germes comme des ennemis et en adoptant l’approche purement symptomatique de l’allopathie. À mes yeux, la médecine naturelle ne doit jamais lutter « contre » un signe clinique quelconque car c’est en amont de cette manifestation corporelle que se situe le problème.

Pour rétablir les équilibres physiologiques, ma priorité absolue va à l’hygiène vitale, c’est-à-dire aux « facteurs naturels de santé » que sont le soleil, l’eau pure, l’air sain sainement respiré, l’exercice physique, la sudation, le sommeil et le repos digestif (jeûne, monodiètes). Cela étant dit, je ne suis pas contre le recours à des remèdes naturels non-dénués de toxicité. À mon avis, les « stars » de la pharmacopée chamanique telles que les champignons hallucinogènes, l’ayahuasca (potion riche en alcaloïdes) ou la kambo (venin de grenouille amazonienne) sont promis à un bel avenir médical. Technique de nettoyage ancestral, le kambo consiste à administrer quelques gouttes du poison purgatif par une mini-scarification de la peau. Cette sorte de cuti-réaction n’est certes pas très naturelle mais elle l’est bien davantage que l’inoculation d’un produit au moyen d’une seringue.

D’accord, cet instrument existait déjà dans la Rome antique, mais c’était pour pratiquer des lavements ou aspirer les plaies remplies de pus ! La piqûre par aiguille, c’est un viol de la peau et une pénétration de l’organisme par effraction : je bannis donc toutes les thérapies nécessitant une injection, sauf cas particuliers comme l’autotransfusion, l’ozonothérapie ou les vitamines à hautes doses. Dans le même ordre d’idée, je ne suis pas fan des machines alimentées à l’électricité. C’est artificiel et on pourrait largement s’en passer, même si elles permettent de s’exposer aux UV, d’inhaler des effluves bienfaisantes ou de transmettre de bonnes ondes à de bonnes fréquences.

En ayant bénéficié pour soigner des névralgies très douloureuses consécutives à une commotion cérébrale, je suis toutefois favorable aux systèmes de « biofeedback » ou de « neurofeedback », lesquels aident à réguler soi-même des fonctions biologiques et des paramètres électromagnétiques internes.

Je suis également un adepte de la cabine infra-rouge, plus abordable que le sauna ou le hammam. Selon le critère « nature », je suis bien sûr un chaud partisan des thérapies manuelles telles que la kinésithérapie, l’ostéopathie ou la chiropraxie. Elles trouvent leur source dans la grande tradition multiculturelle du massage – toutes les civilisations et cultures en sont friandes – et il n’y a rien de plus naturel que de soigner avec les mains.

  • Le côté rationnel

Traditionnelle et naturelle, une médecine devra également étancher ma soif de rationnel pour me séduire. Ce n’est pas que je rejette d’emblée l’irrationnel, l’invisible et l’indémontrable. Il m’est arrivé de consulter un rebouteux, d’expérimenter des thérapies « énergétiques » assez fumeuses ou, dernièrement encore, de tester une approche se qualifiant de « quantique » mais à laquelle l’épithète « ésotérique » conviendrait mieux.

Ce n’est pas parce que je sollicite préférentiellement mon cerveau gauche que le droit n’est pas ouvert à ce qui défie l’analyse et la raison. J’accorde néanmoins beaucoup d’importance à la validation scientifique des techniques de soins. Si elle est parfois un fardeau, la science est aussi un cadeau à ne pas jeter avec son emballage. Il est logique d’exiger des thérapies de faire la preuve de leur efficacité. Comment ? Quoi qu’en dise le Pr Didier Raoult, le plus haut niveau de preuve est apporté par les essais cliniques contre placebo, en double aveugle (ni le patient ni l’expérimentateur ne sait qui reçoit le placebo) et randomisés (les participants sont répartis au hasard dans le groupe placebo ou dans le groupe recevant le remède testé). Ce type d’étude a notamment permis d’abandonner certains vaccins et de constater que plusieurs antidépresseurs ne soulageaient pas mieux que de faux médicaments. Même quand le double insu est impossible, les essais cliniques apportent du grain à moudre sur le plan scientifique.

Récemment, une étude a conclu que le stress post-traumatique pouvait se soigner avec l’acupuncture. Chez les témoins ayant bénéficié d’une séance simulée (les aiguilles n’étaient pas posées sur les bons méridiens), ça marchait nettement moins bien. Mon ami David Servan-Schreiber ne pensait pas autrement et dans son livre « Guérir », paru en 2003, il dévoilait déjà que plusieurs autres thérapies « complémentaires » (supplémentation en Oméga-3, EMDR, sport, cohérence cardiaque…) avaient fait leurs preuves expérimentales et pouvaient avantageusement remplacer les médicaments et la psychanalyse pour traiter la dépression. Or en 20 ans, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts de la science.

Parmi les bonnes nouvelles, un rapport de l’Inserm et une publication du Réseau Sentinelles ont admis l’an dernier que la régulation du rythme cardiaque par la respiration améliorait la santé et méritait l’appellation d’outil thérapeutique. En fouillant un peu, je trouverais facilement d’autres exemples de thérapies « parallèles » snobées et finalement adoubées par la recherche médicale. En revanche, et même si cela va en faire hurler plus d’un, je ne cache pas que l’homéopathie ou la florathérapie n’ont jamais montré une efficacité supérieure au placebo. Bien qu’intrigué par les réels pouvoirs de l’eau et fasciné par les hypothèses de feu Marc Henry, la médecine des dilutions dynamisées m’a toujours laissé sur ma faim. J’ai besoin de rationnel avant de m’emballer et c’est pourquoi vous ne trouverez chez moi ni granules ni élixirs floraux. Si je devais suivre une psychothérapie, j’opterais pour la méthode cognitivo- comportementale car c’est la seule, à ma connaissance, qui a satisfait aux évaluations scientifiques. Et comme en plus elle fait appel à la raison…

( à suivre)

Yves Rasir

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