On vous l’a assez répété : avec la médecine nouvelle du Dr Hamer, la maladie cesse d’être insensée et nous dévoile sa finalité biologique. Avant les découvertes du médecin allemand, le psychanalyste Georg Groddeck et le neurobiologiste Henri Laborit avaient déjà perçu que les maux du corps exprimaient une souffrance psychique et que la somatisation répondait, en dépit des apparences, à une omniprésente logique de vie. Et après l’irruption du paradigme hamérien, de nombreux médecins et thérapeutes ont élargi cette compréhension à l’ensemble des dysfonctionnements, comportements ou événements qui jalonnent une existence humaine : rien n’est le fruit du hasard et tout ce qui nous arrive sur terre peut s’éclairer à la lumière de notre vécu émotionnel et à celle de l’histoire de nos aïeux. Formé à ces différentes approches novatrices et nourri de toutes ces influences, l’écrivain belge Bernard Tihon avait déjà exploré le « pourquoi » des pathologies dans sa trilogie « Le sens des maux ». Cette fois, après avoir relu l’œuvre de Laborit, il a repris la plume pour proposer plus vastement de « Décoder le sens de la vie », un ouvrage dont les éditions Néosanté viennent de publier le premier tome. En guise de dossier , nous reproduisons ci-dessous les deux premiers chapitres du livre, où l’auteur rappelle que la vie de l’ Homme est avant tout le reflet de sa volonté – animale et inconsciente – d’assurer sa survie.
Le sens de la vie est une question à laquelle se sont intéressés de nombreux auteurs, dramaturges, philosophes et théologiens. Au cours de l’histoire, dans les différentes cultures, de nombreux courants philosophiques, artistiques, religieux ou scientifiques se sont emparés de cette question pour la traiter chacun à leur manière, donnant lieu à autant de réponses différentes.
L’expression « le sens de la vie » désigne l’interrogation profonde sur la finalité de la vie, de l’existence, en particulier l’existence humaine. Cette interrogation est considérée comme étant inhérente à l’être humain. Contrairement aux animaux, l’être humain, doté de la pensée, se soucie du sens de la vie et du sens de sa vie. Et parfois cette question le perturbe fortement, car il ne trouve pas toujours une réponse. À défaut de trouver un sens à « la » vie en général, il se contente alors d’essayer de donner un sens à « sa » vie en particulier.
Pour ce qui concerne la question du sens général de la vie, le moins que l’on puisse dire est que les réponses des experts divergent et qu’on finit par accepter l’idée qu’elle n’en a pas, comme le dit si bien Shakespeare par la voix de Macbeth.
« Life’s but a walking shadow, a poor player that struts and frets his hour upon the stage and then is heard no more : it is a tale told by an idiot, full of sound and fury, signifying nothing ». (La vie n’est qu’une ombre qui passe, un pauvre acteur qui se pavane et s’agite durant son heure sur la scène et puis qu’on n’entend plus : c’est une histoire racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur, qui ne signifie rien.)
Si vous préférez la version cinématographique des Monty Python, elle est tout aussi absurde, comme l’atteste le film portant ce titre qui a obtenu le grand prix spécial du jury au Festival de Cannes en 1983.
Nietzsche lui-même, qui est pourtant considéré comme l’inventeur de l’expression, estime très justement que le sens de la vie ne peut être interprété par l’être humain qui fait partie lui aussi de la vie elle-même. En effet, nous sommes toujours prisonniers de nos propres fictions. Chaque interprétation humaine du sens de la vie ne peut être qu’influencée par les fictions qui gouvernent son auteur.
Je n’ai pas pour projet, avec ce livre, de donner un nouveau sens philosophique à la vie. J’ai pourtant donné le titre Le sens de la vie – tome 1 : la survie à mon ouvrage, car d’une part, il exprime que la vie n’a d’autre sens qu’elle-même et il résume la logique de survie qui est à l’origine de son succès depuis des millénaires et qui s’applique à toutes les choses de la vie. D’autre part, la survie est l’essence de la vie, c’est à la fois la chose essentielle, sans quoi rien n’est possible, et le moyen d’avancer dans la vie, de parcourir un beau trajet, de faire des beaux projets de vie. Mon projet est de décliner ce thème au cours d’une série d’évènements ou manifestations qui marquent les différentes étapes de notre vie.
L’héritage des travaux d’Henri Laborit
Henri Laborit est né en 1914 en Indochine française et il est mort en 1995 à Paris. Médecin chirurgien et neurobiologiste, il était également philosophe, éthologue (spécialiste du comportement des animaux) et « eutonologue » suivant sa propre expression (spécialiste du comportement des humains). Il s’est fait connaître du grand public en participant au film « Mon oncle d’Amérique » d’Alain Resnais, grand prix spécial du jury au Festival de Cannes de 1980. Souvenez-vous des personnages incarnés par Gérard Depardieu, Roger-Pierre et Nicole Garcia, dont les conflits et leur incidence sur leurs stress et leur santé étaient commentés par Laborit.
Durant toute sa vie, il est un esprit curieux et anticonformiste, un homme libre dans l’univers des disciplines scientifiques spécialisées, capable de faire le lien entre plusieurs systèmes. En tant que chirurgien, il constate que malgré une action opératoire rigoureuse, dans certains cas la mort survient néanmoins inexorablement et il cherche des solutions. Il s’intéresse d’abord à la qualité de l’anesthésie, ce qui conduit à deux grandes découvertes. D’une part, il met au point la technique de l’hibernation artificielle, qui va révolutionner la chirurgie. D’autre part, il découvre le premier tranquillisant : la molécule de chlorpromazine qui sera utilisée comme neuroleptique pour le traitement de la schizophrénie. Il s’oriente par la suite vers l’étude des mécanismes liés au stress. Avec son livre La nouvelle grille, il fait connaître ses idées sur la biologie comportementale. Le bon accueil reçu de la part de lecteurs spécialistes le pousse à écrire ensuite Eloge de la fuite qui en constitue une version destinée au grand public, qui sera rééditée plusieurs fois en format de poche.
« La seule raison d’être d’un être, c’est d’être. C’est-à-dire, de maintenir sa structure. C’est de se maintenir en vie. »
Ainsi, une pulsion, la plus forte de toutes, pousse les êtres vivants à se maintenir en vie. Les animaux et les êtres humains, contrairement aux plantes, ne peuvent rester en vie qu’en consommant de la nourriture, qui est de l’énergie solaire transformée par les plantes. Pour ce faire, ils sont forcés de se déplacer, d’agir à l’intérieur d’un espace. Pour se déplacer dans un espace, il leur faut un système nerveux, avec un cerveau, qui va leur permettre d’agir dans leur environnement.
L’évolution des espèces est conservatrice, dans le sens où elle garde les atouts qui ont précédé tant qu’ils peuvent encore servir. Dans le cerveau de l’Homme, des pulsions très primitives subsistent. C’est ainsi que dans le cerveau humain, on trouve :
le cerveau inconscient des reptiles qui déclenche les comportements de survie immédiate qui permettent le maintien de la structure vivante (boire, manger, copuler) ;
le cerveau inconscient des mammifères, que Laborit appelle cerveau de la mémoire : la mémoire de ce qui est agréable ou désagréable permet d’agir en connaissance de cause et ouvre la porte aux émotions (positives ou négatives) ;
enfin le cortex cérébral, seule partie consciente du cerveau qui a pris un développement considérable chez l’être humain, que l’on dit associatif, car il associe les voies nerveuses sous-jacentes pour pouvoir créer un processus imaginaire et un langage verbal sophistiqué.
Ces trois étages du cerveau doivent fonctionner ensemble. Pour ce faire, ils sont reliés par des faisceaux qui vont être à l’origine de quatre types principaux de comportements :
un comportement de consommation par l’assouvissement d’un besoin ;
un comportement qui aboutit à une récompense : quand on se rend compte qu’assouvir un besoin équivaut à un plaisir et/ou qu’on a l’expérience d’une action qui aboutit à un plaisir, on essaie de la renouveler ;
un comportement qui fait suite à une punition quand on se rend compte qu’une action aboutit à un résultat négatif, agressif : soit on va essayer de lutter pour détruire l’agression (par des actes ou par des paroles), soit on va chercher à l’éviter par la fuite ;
un comportement d’inhibition de l’action qui est le résultat de ne pouvoir contrôler son environnement : quand on ne peut ni fuir ni agir, on ne bouge plus, on attend, en tension, sans autre solution, dans l’angoisse et le stress dus à l’impossibilité de dominer une situation, et si cette situation se prolonge, des perturbations psychobiologiques arrivent (maladies infectieuses suite à la baisse de l’immunité, dépression et autres maladies mentales, maladies psychosomatiques, Laborit reconnaissant même que toute pathologie pouvait dépendre de ce système).
Ces divers comportements se déclenchent en utilisant un outil très important mis en exergue par Laborit : la mémoire inconsciente. Depuis l’origine de la vie, la mémorisation des évènements a été indispensable au maintien de la vie et à son adaptation aux conditions changeantes tout au long de son évolution, afin de faire face à chaque situation en utilisant la réaction adéquate. C’est la mémoire des bonnes et des mauvaises expériences, de l’efficacité ou de l’inefficacité d’une action, qui le permet. Chaque être humain mémorise ses propres expériences et hérite de la quintessence des solutions qui ont été utilisées par les êtres vivants qui l’ont précédé. Le système nerveux cérébral est ainsi fortement influencé par les symboles, l’inconscient collectif et les stéréotypes socio-culturels du milieu dans lequel vit la personne. Nous sommes avant tout les autres, nous sommes ce que les autres ont mis en nous.
Afin d’éviter de se retrouver dans l’inhibition de l’action, qui est le plus mauvais cas de figure, la recherche de la domination de l’autre, des autres, dans un espace qu’on peut appeler le territoire, est selon Laborit la base fondamentale de tous les comportements humains, et ceci, de manière le plus souvent inconsciente.
Il en arrive donc aux deux conclusions fondamentales suivantes :
tant qu’on n’aura pas informé très largement tous les êtres humains de la façon dont fonctionne leur cerveau inconscient, la façon dont ils l’utilisent inconsciemment, tant qu’on ne leur aura pas fait comprendre que jusqu’ici cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chances que quelque chose change sur la planète (notamment pour ce qui concerne tous les types de guerres) ;
l’agression étant le plus souvent socialement réprimée (notamment par la punition des crimes) et la domination illusoire (toute domination conduit à une nouvelle échelle de valeur, destinée elle aussi à être renversée), il ne reste que la fuite comme solution digne d’éloge.
Dans sa Nouvelle Encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu, Bernard WERBER évoque les travaux de Laborit et il nous parle aussi de la notion d’homéostasie comme étant une clé fondamentale de la survie par l’adaptation.
« Toute forme de vie est en recherche d’homéostasie, c’est-à-dire d’équilibre entre milieu intérieur et milieu extérieur. Toute structure vivante fonctionne en homéostasie. L’oiseau a des os creux pour voler. Le chameau des réserves d’eau pour survivre dans le désert. Le caméléon change la pigmentation de sa peau pour se fondre dans le décor et échapper ainsi à ses prédateurs. Ces espèces, comme tant d’autres, ont réussi à se maintenir en vie jusqu’à nos jours en s’adaptant à tous les bouleversements de leur milieu ambiant. Celles qui ne surent pas trouver un équilibre avec le monde extérieur ont disparu. L’homéostasie est la capacité d’autorégulation de nos organes par rapport aux contraintes extérieures. »
Le mot homéostasie vient du grec « homoios » = semblable, et « stasis » = arrêt, position. L’homéostasie est la stabilisation, le réglage chez les organismes vivants, de certaines caractéristiques physiologiques (notamment la pression artérielle et la température), le maintien de l’ensemble des paramètres physico-chimiques de l’organisme d’un individu lui permettant de rester en équilibre dynamique. La détermination de ces paramètres fait appel à des mécanismes de régulation complexes qui sont en interaction les uns avec les autres. Le sens de la vie c’est…la recherche constante de l’homéostasie, de l’équilibre entre ce que nous vivons à l’intérieur (le fonctionnement automatique de nos organes, ainsi que nos émotions et nos pulsions) et ce que nous vivons à l’extérieur de nous (les facteurs coercitifs de contrainte de notre environnement, qui nous viennent de la nature, des autres êtres vivants et des lois). Toute notre vie, à chaque instant, nous faisons cela dans le but de vivre le plus longtemps possible. C’est ainsi depuis la nuit des temps et c’est toujours le cas, même si le confort de la vie moderne tend parfois à nous le faire oublier. Tout le reste vient après, tout le reste ne peut exister que si cette condition préalable de survie est remplie.
« J’imagine le mode de vie des hommes à l’époque paléolithique durant l’hiver. Le but des efforts n’était pas la vieillesse, n’était pas la richesse, n’était même pas le rêve d’un éventuel retour à une quiétude antérieure à la naissance. Pas même la vengeance. Il ne consistait même pas à atteindre l’année suivante. Ils cherchaient à atteindre vivants la nuit. » Pascal QUIGNARD « Les désarçonnés »
La survie est inscrite dans le code biologique de tous les êtres vivants depuis le début de la vie comme étant la valeur fondamentale, celle qui compte le plus, la seule qui permette de faire d’autres projets. Concernant les êtres humains, le code archaïque de survie s’est inscrit au cours des premiers millénaires d’existence de l’espèce, quand ils vivaient dans la nature sauvage au milieu des prédateurs en tous genres. Tous nos réflexes de survie viennent de là et sont encore en nous, dans nos gènes, au 21e siècle, s’ils peuvent encore nous être utiles. L’Homme préhistorique avait pris l’habitude de sortir prudemment de sa grotte, en regardant à gauche et à droite, sachant qu’un ours pouvait l’attendre et lui donner un coup de patte fatal. L’Homme d’aujourd’hui a gardé le même réflexe de prudence s’il part camper dans la nature sauvage. Et chaque fois qu’il traverse une rue d’une ville, il reproduit ce réflexe ancestral adapté à la vie moderne pour éviter d’être écrasé par une voiture (qui est devenue un des principaux « prédateurs » de nos jours).
Du point de vue étymologique, le mot survie vient du latin :
« super » = en dessus, par-dessus ; du dessus, d’en haut ; en plus, au-delà, en outre ;
ou « supra » = à la partie supérieure, en haut, au-dessus ; plus haut, précédemment ; en plus, en sus, plus ;
et « vita » = vie, existence ; genre de vie, manière de vivre ; subsistance, moyen d’existence ; réalité ; personne chérie, objet cher ; vie humaine, monde ; vie racontée, biographie, histoire.
Le Robert définit la survie comme étant le fait de se maintenir en vie, et comme étant l’ensemble des processus physiologiques qui mènent à la plus longue existence de l’individu. C’est dans ce sens-là que je parlerai de survie tout au long de ce livre. D’une certaine manière, on peut dire que la survie est le synonyme de la vie, en tout cas de la vie prolongée, le plus longtemps possible, par le biais d’une succession d’instants au cours desquels la vie est maintenue et la vie continue grâce à la réussite des processus d’homéostasie. Mais dans un autre sens, qui rejoint l’étymologie qui place la survie au-dessus de la vie, la survie est plus importante que la vie. Pour pouvoir vivre, il faut d’abord survivre. Pour pouvoir faire des beaux projets dans l’amour et dans le travail et bien se régaler, le préalable est d’assurer sa survie.
La survie est à la fois une notion individuelle (chaque être vivant est programmé en termes de survie) et une notion collective (chaque famille d’individus et chaque espèce vivante ont aussi des programmes de survie communs). Hiérarchiquement, les programmes de survie collectifs sont supérieurs aux programmes de survie individuels. En effet, cela n’a aucun sens qu’un individu survive si cela risque de nuire à la survie de sa famille ou de son espèce. Le plus important c’est la perpétuation de la vie. Celle-ci passe parfois par le sacrifice nécessaire d’un individu car elle privilégie toujours la logique de survie collective.
Dans chaque être vivant, tout est programmé en termes de survie, et particulièrement la centrale de commande du corps qui est le cerveau inconscient.
La prise de conscience de cette équation fondamentale va avoir lieu dans d’autres cerveaux que celui d’Henri Laborit, chez d’autres médecins passionnés par la guérison (eux aussi insatisfaits des résultats de la médecine traditionnelle) et qui, dans sa foulée, vont développer cette théorie particulièrement pour tout ce qui concerne les maladies, faisant le lien entre chaque maladie et le stress de survie qui l’a précédée dans le psychisme du malade. Je ne développerai pas ces théories appliquées aux diverses maladies (que l’on regroupe généralement sous le vocable de « décodage biologique ») dans le cadre de cet ouvrage-ci car j’en ai déjà parlé longuement dans les trois tomes de mon essai intitulé Le sens des maux.
Mon projet aujourd’hui est d’appliquer le fruit des recherches de Laborit à d’autres choses que les maladies, à tout ce qui fait partie de la vie. En repartant des trouvailles de Laborit, on peut voir quel sens cela donne à la vie, aux choses de la vie (grandes ou petites), à tous les évènements que l’être humain vit de la naissance à la mort, et même avant, et même après. Quand on sait que tout est programmé en termes de survie, cela nous ouvre des portes pour une autre compréhension, une autre vision de ce qui nous arrive dans la vie. Au-delà de la logique de survie, chacune de ces choses est riche aussi d’un sens symbolique issu de l’inconscient collectif de l’humanité qui apporte des précisions et des tonalités pour mieux les apprécier.
Par exemple, quand un enfant naît, les premières informations que nous recevons de lui sont : son prénom, sa date de naissance (et parfois l’heure en plus), son poids, sa taille. Ce sont les informations prioritaires qui figurent sur le faire-part de naissance. Ce sont donc des informations importantes sur la vie d’un être humain et ses chances de survie. Les prénoms, les nombres et le poids seront notamment étudiés ci-après afin de voir quel est leur sens dans la logique de survie.
Et si, forts de cette équation héritée de Laborit, nous regardions les choses de la vie différemment ? Le sens de la vie c’est…d’avoir jadis été un animal avant de devenir un être humain
L’animal ou la dimension instinctive qui est en l’Homme
Quel est le sens de l’évolution des espèces ? Que reste-t-il de l’animal dans l’Homme ? Qu’est-ce qui différencie le règne animal du règne humain ?
L’évolution des espèces est la transformation progressive des espèces, d’une espèce vivante en une autre. Cette évolution est à la fois continue, par hérédité des caractères acquis, et discontinue, par mutation des caractères génétiques et morphologiques au cours des générations. La théorie de l’évolution est une explication de la diversification des formes de vie qui sont apparues dans la nature, pour aboutir à la biodiversité actuelle. Cette théorie s’oppose à la croyance religieuse selon laquelle c’est Dieu qui aurait créé la terre et tous les êtres qui la peuplent. La place de l’être humain prend une nouvelle signification : il n’est plus le centre de la création ; l’espèce humaine n’est qu’une nouvelle espèce animale parmi d’autres, elle-même issue d’autres espèces.
Comme toute autre espèce vivante, l’espèce humaine représente l’aboutissement d’une longue série de transformations. Ces transformations s’opèrent si et seulement si elles sont avantageuses pour la survie individuelle et/ou si elles favorisent la reproduction de l’espèce et par conséquent la survie collective par la perpétuation des caractéristiques ainsi sélectionnées. C’est donc la logique de survie qui gouverne l’évolution de toutes les espèces et lui donne un sens. Chaque espèce s’est spécialisée au fil du temps dans des domaines qui lui sont propres. Par exemple, la girafe avec son long cou pour pouvoir manger les feuilles des arbres en hauteur, la chauve-souris avec son sonar pour s’orienter et capturer ses proies, l’être humain avec le développement extraordinaire de son cerveau (néocortex) qui lui donne la capacité de penser. Ainsi l’être humain est le résultat d’un très long processus de sélection naturelle et de lutte pour la survie (et son cousin le plus proche en la matière est le singe).
Cette théorie de l’évolution permet d’expliquer la structuration du vivant et fédère toutes les branches de la biologie. Tous les organismes vivants ont un ancêtre commun et sont le produit d’un processus d’évolution qui a commencé sur la terre il y a 4,5 milliards d’années. La comparaison des séquences d’ADN ou d’ARN a permis aux scientifiques de déterminer la distance entre les différentes espèces et ainsi d’élaborer un arbre généalogique et phylogénétique de toutes les espèces où chaque nœud représente l’ancêtre commun de ses descendants. Ce processus d’évolution est la conséquence d’une série d’évènements biologiques qui s’organisent autour du phénomène de sélection naturelle et de lutte pour la survie et qui concernent tous les êtres vivants sans exception. Ce cheminement favorise les êtres les mieux adaptés à leur milieu et les mutations qui vont dans le même sens, ce qui entraîne dans la plupart des cas une complexification des formes du vivant, sauf pour certaines formes archaïques qui subsistent dans le même état depuis la nuit des temps.
D’abord il y a eu les bactéries, sous la forme d’organismes unicellulaires sans noyau. C’est important de le savoir : la vie a commencé avec les bactéries ! Réfléchissons-y à deux fois lorsque nous cherchons à les éradiquer par divers moyens (antibiotiques et produits de nettoyage notamment) car c’est la vie que nous éliminons. Les bactéries sont nos amies et elles nous ont été bien utiles depuis l’origine de la vie jusqu’à ce jour. Ensuite il y a eu les archées (micro-organismes unicellulaires sans noyau), puis les eucaryotes, une branche de l’arbre de la vie (qui n’est encore qu’un petit arbuste à ce moment) constituée de cellules avec noyau, qui va être à l’origine d’un arbre gigantesque formé des quatre règnes vivants multicellulaires, avec diverses ramifications échelonnées dans le temps : algues, plantes, champignons, éponges, mollusques, insectes, poissons, reptiles, et enfin les mammifères dont l’être humain fait partie.
Cela veut donc dire que l’être humain a dans ses mémoires biologiques (ou pour le dire autrement, parmi ses ancêtres) des poissons, des reptiles et les premiers mammifères qui ont « ouvert » cette nouvelle branche de l’arbre de la vie, parmi lesquels eomaia scansoria, la mère grimpante de l’aube, la mère primordiale qui sait grimper aux arbres, la première mère, qui a été un des premiers mammifères terrestres et qui a survécu aux grands cataclysmes qui ont entraîné l’extinction des dinosaures, grâce notamment à son mode de reproduction révolutionnaire pour l’époque et qui marche toujours très bien aujourd’hui. Il reste encore en nous aujourd’hui les vestiges généalogiques de nos précédentes mutations. Il nous reste quelque chose du poisson, du reptile et des divers mammifères qui ont été nos ancêtres. Il nous en reste aussi quelques conflits (par exemple les conflits de territoire) et de merveilleuses solutions de survie que nous utilisons encore dans notre vie quotidienne du 21e siècle.
L’animal : étymologie, définition et symbolique
Le mot animal vient du latin « anima » = âme, souffle, vie, air, haleine, et de « animus » = âme, esprit (par opposition au corps) ; siège de la pensée, du désir, de la volonté, du sentiment, des passions. On dirait presque une définition de l’être humain ! Comme quoi les animaux ne sont pas très éloignés de nous puisqu’ils ont déjà une âme. Seule leur manque la pensée élaborée et la conscience qui est propre à l’espèce humaine. L’étymologie en tout cas confirme clairement l’origine animale de l’être humain.
Le dictionnaire définit l’animal comme étant un être vivant organisé, doué de sensibilité et qui peut se mouvoir (par opposition au végétal). C’est donc ce dernier élément qui est la caractéristique principale du règne animal et qui le distingue des autres branches de l’arbre de la vie : sa capacité de se mouvoir, le mouvement. Cet élément est fondamental aussi pour comprendre l’être humain. Nous partageons avec les animaux ce caractère qui nous distingue des pierres et des plantes. Le mouvement. Mouvement extérieur qui permet de bouger, de changer de place, de migrer,…ce qui donne plus de solutions de survie. Mouvement intérieur aussi : la capacité de changer, d’évoluer. Et si l’on doit résumer la vie à un seul mot, c’est bien celui-là : vivre c’est changer, en permanence, de la naissance à la mort. Le sens de la vie c’est d’évoluer, de bouger (de fuir aussi comme le dit Laborit). Ne restez pas immobiles, dans l’inhibition de l’action, « scotchés » à vos petits acquis et à vos regrets, allez de l’avant. Comme le chante Alain Souchon, « on avance, on avance, c’est la seule véritable évidence, on avance ». On ne sait pas toujours où on va, mais on sait qu’on avance.
D’un point de vue symbolique, l’animal exprime la dimension instinctive et pulsionnelle de l’être humain. Ce sens est à la fois positif et négatif. Il est positif car il le rattache à la terre et à la survie (l’instinct animal est fondé essentiellement sur la logique de survie). Regardez comment vivent les animaux, comment ils arrivent à survivre dans des milieux très inhospitaliers (extrêmement froids ou extrêmement chauds par exemple) et vous en apprendrez beaucoup sur les stratégies de survie. Il est aussi négatif car il représente l’assujettissement aux pulsions des sens et aux passions non raisonnables. C’est dans ce sens-là que l’on qualifie parfois péjorativement un homme en disant qu’ « il est une vraie bête ». Il ne réfléchit pas à ce qu’il fait, il agit sans raison (alors que celle-ci est normalement l’apanage des humains), il agit en suivant ses pulsions (ce qui peut conduire au crime dans certains cas). Plusieurs phobies orientées sur les animaux trouvent leur origine dans cet aspect négatif : l’animal revêt alors une signification spécifique négative pour l’inconscient humain en exprimant l’énergie pulsionnelle des désirs, libre et incontrôlée, et c’est sans doute la crainte d’être submergé par cette dimension primitive (sa propre dimension primitive et naturelle en fait) qui effraie l’être humain civilisé. Comme l’explique Jung : « l’animal qui est dans l’homme sa psyché instinctuelle, peut devenir dangereux, lorsqu’il n’est pas reconnu et intégré à la vie de l’individu ; l’acceptation de l’âme animale est la condition de l’unification de l’individu, et de la plénitude de son épanouissement ».
L’animal incarne donc selon les cas soit une qualité soit une faiblesse humaine. L’importance symbolique, voire parfois totémique, accordée aux animaux, se retrouve dans beaucoup de cultures et de traditions religieuses, ce qui démontre une nouvelle fois l’importance du lien qui unit l’Homme à l’animal.
L’humain : étymologie et définition
Le mot homme vient du latin « homo » = homme (au sens général du terme), d’une racine « on » signifiant « terre ». Homme = né de la terre. Encore une fois, l’étymologie rejoint l’explication scientifique de l’évolution des espèces : l’homme trouve bien son origine dans les premières formes de vie issues de la terre, bactéries, archées et eucaryotes.
Biologiquement, l’Homme se définit comme un mammifère primate, de la famille des Hominidés, seul représentant de son espèce. Suivant l’évolution de l’espèce humaine, l’homo sapiens, dont tous les humains qui peuplent aujourd’hui la terre sont issus, provient d’une évolution probablement buissonnante au cours de laquelle plusieurs branches de la lignée humaine ont coexisté, notamment l’homme de Néandertal dont on sait aujourd’hui que la lignée s’est éteinte. Au cours de cette longue évolution (7 millions d’années), l’homme se différencie progressivement de son cousin le singe pour ressembler de plus en plus à l’homme d’aujourd’hui. Suivant les diverses appellations des scientifiques, l’homme est devenu progressivement « debout », « robuste », « habile », « artisan »,…et finalement sapiens, ce qui veut dire intelligent, sage, raisonnable, prudent. Ce sont là nos quatre valeurs cardinales. Si l’intelligence a un sens, c’est de nous mettre sur la voie de la sagesse. Notre histoire nous dit que la sagesse est le but ultime de l’homme, la valeur grâce à laquelle il pourra toujours survivre. Le sens de la vie d’un être humain est de devenir sage (si on ne l’est pas), de le rester (si on a déjà la chance de l’être), et d’éduquer nos enfants à l’intelligence, la sagesse, la raison et la prudence.
Bernard Tihon