Résumé des épisodes précédents : nous sommes des mammifères sociaux et, de ce fait, nous sommes tous, à des degrés divers, concernés par une peur très primitive: la peur de la sanction en termes de rejet ou de violence. Notre cerveau archaïque considérant cette éventualité comme critique, nous avons viscéralement peur, avec ou sans conscience, dès que nous sommes confrontés à la sanction d’une manière ou d’une autre. Et par conséquence, nous sommes obsédés par la nécessité de plaire et de ne pas déplaire pour nous faire aimer et pour ne pas être sanctionnables (voir Néosanté n°13 et 14).
Au mieux, tout cela nous complique juste plus ou moins l’existence, mais cela peut avoir de bien plus graves conséquences, comme de conduire à l’hôpital psychiatrique ou mener au suicide. Mais surtout, la peur de la sanction et la nécessité de plaire et ne pas déplaire sont finalement, directement ou indirectement, l’origine de presque tous nos symptômes ; huit fois sur dix. C’est du moins mon avis.
La Logique du Cerveau
Il convient d’abord de rappeler que notre cerveau archaïque fonctionne à sa façon. Que nous soyons effectivement sanctionnés en termes de rejet ou de violence, même si cela ne nous vaut pas d’être réellement en danger; que nous soyons effectivement menacés d’une sanction, même si elle ne se concrétise pas ou ne risque pas d’être dangereuse ; que nous nous sentions rejetés, même si ce n’est pas le cas ; ou que nous ayons seulement peur d’une éventuelle sanction : tout cela revient strictement au même. Car notre cerveau ne tient pas compte de toutes ces subtilités : il ne retient que la notion de sanction, de rejet ou de violence, et donc de danger. Et il se base sur l’intensité de notre stress conscient ou inconscient pour évaluer la gravité de la situation et il réagit en fonction.
La cause
La sanction ou son éventualité est très souvent la cause directe du symptôme, qu’il soit physique, psychique ou comportemental. C’est en tout cas ma constatation et je pourrais vous raconter des centaines d’histoires pour l’illustrer. En voici quelques unes :
Par exemple : une jeune femme ne supporte pas les portes qui grincent au point d’avoir toujours une burette d’huile sous la main. Durant l’enfance, elle a été maltraitée par un grand frère sadique dont la porte de chambre grinçait. Depuis, elle se sent menacée au plus profond d’elle dès qu’elle entend une porte couiner.
Par exemple : une petite fille sachant déjà lire et écrire à son entrée au CP grossira de dix kilos en un mois parce que l’institutrice par ailleurs très gentille lui dira seulement : «Pas toi, Nathalie», sous-entendu «Laisse les autres répondre puisque tu sais déjà». L’enfant le vivra comme un profond rejet.
Par exemple : une dame basculera dans une forte dépression à cause d’un conflit avec sa sœur et surtout parce que sa mère l’en tiendra pour responsable alors qu’elle n’y est pour rien. Dans ce cas, le symptôme est induit par l’immense peur que vit cette femme qui se sent rejetée par sa famille (j’appelle cela une dépression de peur).
Par exemple : un leader syndical à l’origine d’une grève qui paralysera son entreprise plusieurs jours fera un lymphome peu de temps après du fait d’une peur profonde et inconsciente des représailles. Dans ce cas, le symptôme est induit par l’éventualité d’une agression et la nécessité d’y faire face.
Par exemple : une femme fera une pneumopathie sévère suite à une grosse dispute avec son mari et surtout parce que ce dernier ne lui adressera pas la parole pendant trois jours. Ce silence vaudra à cette femme une peur de la sanction en termes de rejet si intense que sa biologie a cru qu’elle était en danger de mort.
Par exemple : une autre fera un cancer du sein juste après avoir parlé de divorce à son mari et qu’il l’ait menacée des pires représailles. Elle se sentira piégée comme un animal à la merci de son prédateur et sa biologie réagira d’après un réflexe très archaïque de production de substances répulsives (voir «le Sein : de l’Allaitement à la Répulsion» à la rubrique Publications sur biopsygen.com).
La cause de la cause
Bien plus souvent encore, la peur de la sanction est à l’origine du blocage qui nous vaut d’être en conflit intérieur au point de somatiser en fonction de la tonalité spécifique du problème :
Par exemple : un patron fera un «burn out» sévère après s’être battu seize heures par jour et sept jours par semaine pendant quinze ans pour maintenir à flot l’entreprise à la tête de laquelle il a succédé à son père. Bien que sachant la mission impossible du fait de la conjoncture, il s’acharnera quand même pour ne pas décevoir son vieux père.
Par exemple : une pianiste virtuose fera des tendinites au bras droit juste avant des concerts ou des enregistrements importants. Dans ce cas, le symptôme est typiquement le signe d’un conflit de déficit de performance, lequel est induit par la peur de ne pas être à la hauteur.
Par exemple : une femme développera un fibrome utérin du fait de sa profonde frustration de ne pas faire l’enfant qu’elle désire de peur qu’une grossesse ne la mette en délicatesse avec son employeur. Dans ce cas, le symptôme est typiquement le signe d’un désir d’enfant inassouvi mais il est induit par la peur de déplaire.
Par exemple : une adolescente fera des colopathies à cause d’un profond ressentiment ignoré qu’elle éprouve vis-à-vis de son petit frère trisomique par ailleurs adorable mais qui «pourrit» la vie de la famille. Dans ce cas, le symptôme est typiquement le signe d’un ressentiment mais il reste inaccessible puisqu’il serait injuste d’en vouloir à ce petit garçon qui n’est pas responsable de sa trisomie.
Le Conflit Verrouillant
Enfin, dans certains cas, cette peur de la sanction peut être le conflit verrouillant qui nous empêche de sortir du problème et donc parfois de guérir du symptôme : j’ai par exemple reçu une dame diabétique depuis qu’elle est mariée à un homme violent et violeur, cette hyperglycémie étant là pour l’aider à faire face à l’adversité. Et quand je lui ai demandé si elle avait envisagé de divorcer, alors sa réponse a fusé : «Mais c’est absolument impossible !.. Ma mère ne me le pardonnerait jamais». C’est donc la peur d’être rejetée par sa mère qui l’oblige à rester avec son bourreau.
A suivre
Je vous raconterai bientôt comment la culpabilité et la dévalorisation prennent racines dans cette peur de la sanction en termes de rejet ou de violence.
Laurent Daillie