Savez-vous que le corps humain contient plus de bactéries que de cellules ? L’équilibre de la flore intestinale est d’une importance capitale pour l’immunité et la santé. L’alimentation de type chasseur-cueilleur s’avère la plus propice au bon fonctionnement des intestins.
Alors que vous êtes en train de débuter la lecture de cet article, vous pensez peut-être être seul. En réalité, des trillions de bactéries (1 trillion = 1 milliard de milliards !) sont avec vous : sur votre peau, dans votre bouche et la majorité dans vos intestins. En fait, nous avons dans notre corps plus de bactéries que de cellules. En poids, ces bactéries représentent 3 à 4 kg de notre poids de corps. Et on estime qu’il y a, dans le monde, 4 à 6 quintillions de bactéries, c’est-à-dire entre 4 et 6 mille milliards de milliards de milliards ! Et dans cet univers de bactéries, les intestins constituent le lieu principal d’échanges entre notre corps et le monde extérieur. C’est là qu’énormément de choses se jouent. On estime que 70% des mécanismes immunitaires sont liés à nos intestins.
Toutes ces bactéries constituent notre flore intestinale et contribuent à la digestion et au métabolisme des vitamines. En particulier, elles synthétisent la vitamine B8, B12 et K. À elle seule, une déficience en vitamine K peut augmenter les risques de maladies comme le diabète, l’obésité, l’eczéma, l’anémie, la perte des cheveux, la maladie de Parkinson, l’Alzheimer, etc., et d’autres troubles immunitaires. Surtout, une perturbation de notre flore intestinale peut causer des maladies inflammatoires chroniques des intestins (comme la maladie de Crohn, qui se traduit par de fortes douleurs abdominales après repas, des diarrhées chroniques, de la fatigue, etc.) ou le syndrome du colon irritable.
Toutes ces inflammations des intestins rendent la paroi intestinale perméable. On parle de « leaky gut » en anglais : les jonctions serrées des tissus épithéliaux étant endommagées, ces tissus laissent passer des bactéries et autres éléments, contre lesquels le système immunitaire est obligé de se défendre. Ce qui affaiblit tout le système immunitaire. Mais cela peut également provoquer une réponse auto-immune : des bactéries antigènes (c’est-à-dire qui engendrent une réponse immunitaire) sortent de l’intestin et déclenchent des réponses immunitaires ailleurs dans le corps. Celui-ci ne discerne plus ses propres protéines des autres et en vient à détruire ses propres tissus. Cela est particulièrement marquant au niveau des articulations. 20% des patients atteints de maladies inflammatoires chroniques des intestins ont des inflammations articulaires. Et inversement, 67% des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde ont des inflammations intestinales !
Autrement dit, il est extrêmement important pour toute personne pratiquant un sport, d’avoir une alimentation la moins inflammatoire possible. Mais quelle est cette alimentation ? Et en quoi la paléonutrition peut-elle nous aider ? On remarque tout d’abord que notre flore intestinale est fortement appauvrie par rapport à celle de nos ancêtres, à celle des chasseurs-cueilleurs qui perdurent actuellement, ou encore à celle des primates proches de nous, vivant à l’état naturel. Quelles en sont les raisons principales ?
Notre mode de vie
Le stress, premièrement, peut perturber la composition de notre flore intestinale et augmenter l’inflammation et la perméabilité des tissus intestinaux. Vient ensuite notre obsession de l’hygiène, qui nous coupe du contact avec tout un ensemble de micro-organismes. Pourtant, notre système immunitaire doit apprendre à distinguer les pathogènes dangereux des germes inoffensifs et de nos propres cellules, afin de lutter efficacement contre les pathogènes. Pour arriver à cela, il a besoin d’être exposé à une variété de micro-organismes communs. Sans une telle exposition depuis le plus jeune âge, le risque est plus grand de développer des allergies et des déficiences auto-immunitaires. Autrement dit, laissez vos enfants jouer dans la terre et revenir avec des mains sales ! Enfin, comme on reçoit normalement nos bactéries intestinales par la mère lors de la naissance, les bébés nés par césarienne ont une flore intestinale différente. Et on remarque qu’ils ont une plus grande probabilité d’avoir des problèmes de digestion.
Notre alimentation
Avant l’expansion de l’agriculture, notre alimentation était beaucoup plus variée en fibres diverses. En particulier, elle était plus riche en fibres « solubles » (fruits et légumes) qui représentent l’environnement idéal pour des bactéries saines. Inversement, les fibres insolubles que l’on retrouve dans les céréales sont fortement inflammatoires. Il faut s’intéresser aux « lectines », substance qui sert au blé à se protéger des insectes, des bactéries, etc., et qui altèrent fortement la flore intestinale. Les grains de beaucoup de céréales (blé, seigle, orge, avoine), ainsi que les légumineuses, en sont très riches. On en trouve également dans le riz et le soja. Privilégiez une alimentation riche en fibres solubles (légumes, fruits), en vitamine D (poissons gras), vitamine K2, magnésium et en abats comme le foie.
Les « prébiotiques » sont à privilégier : indigérables par les enzymes humaines dans l’intestin grêle, ils stimulent la croissance de bactéries favorables, en jouant le rôle de substrat pour la fermentation des bactéries. Des restes humains datant d’il y a plus de 10 000 ans, dans le désert du Chihuahua (Mexique) montrent une forte consommation de plantes riches en prébiotiques (Ex : artichaut, topinambour, salsifis, chicorée). Et les « probiotiques » ? Les « bonnes bactéries » peuvent en effet aider à rééquilibrer la flore intestinale, en particulier après une prise d’antibiotiques. Mais il n’est pas très naturel d’en consommer de grandes quantités issues de produits laitiers…
Les antibiotiques
Evidemment, on ne peut parler de perturbation de la flore intestinale sans parler des antibiotiques. Après une prise d’antibiotiques, votre flore intestinale peut mettre un mois pour retrouver son équilibre. Ou six mois. Ou un an… Ou jamais ! C’est même la cause principale d’altération de la composition des bactéries dans l’intestin. Et ce ne sont pas que les antibiotiques que vous prescrit votre médecin, pensez aussi aux traces d’antibiotiques dans les viandes et laitages que vous consommez !
Yves Patte