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Décodage biologique des maladiesMédecine nouvelleSanté naturelle

STRESS : relativiser ou agir ?

Par 5 novembre 2015avril 5th, 2023Un commentaire

ARTICLE N° 64 Par Emmanuel Duquoc

Pour le décodage biologique, la cause est entendue : les événements perturbants, lorsqu’ils nous paralysent et sont vécus dans l’isolement, sont pathogènes. Alors que faire lorsque nous sommes pris à partie par une perturbation émotionnelle, stressés, voire traumatisés ? Relativiser ou s’exprimer ? Agir ou intérioriser ?
Petit tour d’horizon des différents moyens de réguler nos émotions et de leurs effets respectifs…

« Pourquoi ai-je attrapé une pneumonie ? Parce que j’étais en inhibition de l’action. » Cette assertion vient d’un des plus célèbres neurobiologistes du XXe siècle. Chirurgien né en 1914, Henri Laborit révolutionna l’anesthésie puis inventa le premier neuroleptique avant de se consacrer à l’étude des mécanismes liés au stress. Il apparut en 1980 dans un film d’Alain Resnais, « Mon oncle d’Amérique », où il jouait son propre rôle, résumant le concept d’ « inhibition de l’action » au travers d’une expérience scientifique sur les conditions de stress dans lesquelles les rats tombent malades ou non.

Les rats stressés d’Henri Laborit

Henri Laborit (1914 – 1995) a développé la théorie de l’inhibition de l’action à partir d’une série d’expériences menées sur des rats de laboratoire. Dans la première expérience, un rat est placé dans une cage à deux compartiments séparés d’une cloison avec porte. Un signal sonore et lumineux est enclenché, puis un courant électrique parcourt le plancher. La porte est ouverte. Le rat apprend rapidement à éviter la décharge électrique en changeant de compartiment. Le même phénomène se produit dans l’autre compartiment, et ainsi de suite à raison de 10 minutes par jour pendant une semaine. Le rat s’adapte et passe d’un compartiment à l’autre sitôt le signal enclenché. Un examen médical révèle un état de santé excellent. Dans une deuxième expérience, deux rats sont placés dans la cage, porte fermée. Même protocole, mais sans possibilité de fuite. Les rats se mettent à se battre. À l’examen biologique, leur état de santé apparaît excellent, à part les morsures et les griffures.
Dans une troisième expérience, un rat est placé seul sans possibilité de fuite. Rapidement, le rat devient prostré. L’examen médical révèle une perte de poids importante, une hypertension artérielle persistant plusieurs semaines et des lésions ulcéreuses à l’estomac. Conclusion du chercheur : en cas d’agression, l’individu qui peut réagir par la fuite ou la lutte ne développe pas de troubles organiques. Celui qui ne peut ni fuir ni lutter entre en « inhibition de l’action », puis présente des pathologies pouvant entraîner la mort.
Pour Henri Laborit, tous comme les rats de son expérience, nous les humains utilisons quatre stratégies pour assurer notre survie : l’action, la fuite, la lutte et l’inhibition de l’action. En l’absence de stress, nous agissons afin de satisfaire nos besoins. En cas de danger, psychologique ou réel, nous optons pour la fuite et si celle-ci échoue, pour la lutte. Mais si nous nous trouvons coincés dans une situation dans laquelle nous ne parvenons ni à fuir, ni à lutter, nous entrons en inhibition de l’action. Efficace à court terme pour apaiser la douleur, mais délétère quand l’agression perdure… C’est ainsi que des symptômes plus ou moins importants apparaissent selon notre vécu personnel et selon l’intensité et la durée de la situation.

8 moyens de sortir de l’inhibition de l’action

Constater que l’on est stressé : identifier nos émotions négatives, les distinguer les unes des autres est un premier pas salutaire pour en sortir, indique le chercheur en sciences cognitives Emre Demilrap.
Supprimer la cause du stress : interrompre une relation conflictuelle, annuler un rendez-vous désagréable, solutionner un problème préoccupant, éviter une personne ennuyeuse. Pour le spécialiste du stress Hans Selye, il était crucial de se défaire du stress le plus vite possible. Pour cela, le chercheur suggérait d’en identifier la cause la plus importante et de ne pas faire l’impasse sur la possibilité de la modifier ou la supprimer.
Se mettre en action : pour Jean-Jacques Crèvecoeur, chroniqueur dans la revue Néosanté, l’action peut être physiologique (spasmes, tremblements, …), physique (s’enfuir, donner des coups, brandir le poing, repousser l’agresseur, …), émotionnelle (pleurer, crier, se mettre en colère, exprimer sa détresse, …), relationnelle (rétorquer, gronder, se faire respecter, taper du poing sur la table, ne pas se soumettre, …).
Positiver ? Relativiser, lâcher prise, s’abandonner ou pratiquer la pensée positive semblent des voies intéressantes… À condition de ne pas tomber dans le déni ! Pour l’éviter, il convient de rester toujours conscient de ses états émotionnels.
Respirer : le pranayama ou yoga de la respiration est connu pour contrôler les émotions. Plus facile d’accès, la cohérence cardiaque consiste à respirer amplement et le dos vertical pendant 3 minutes. Le rythme : une alternance d’inspiration et d’expirations de 5 secondes chacune. Efficace pour recharger ses batteries émotionnelles, soit en cas de stress, soit comme routine quotidienne trois fois par jour.
Exprimer ses émotions et ses sentiments : colère, tristesse, peur : il est salutaire de reprendre le chemin de l’expression. Parler de ce qui nous préoccupe nous permet de le décharger et nous remet en mouvement. Si vous confiez vos sentiments à quelqu’un, choisissez une personne qui sache écouter sans chercher à vous persuader que tout va bien… La créativité, par exemple sous forme de musique, de dessin ou d’écriture automatique, est à la fois une voie d’expression et de sortie de l’inhibition.
Sortir de l’isolement : être entouré ne suffit pas. Décrire les événements stressants ou traumatisants non plus. Il faut que l’émotion liée à ces événements sorte. Les groupes de parole organisés autour de malades améliorent les taux de guérison.
S’activer physiquement : sport et activité physique sont de puissants moyens de sortir de l’inhibition de l’action au quotidien. Le but premier des postures de yoga est de calmer l’esprit.

La pensée positive n’est pas le ressenti

Or, la vie sociale n’est pas exempte de situation stressantes au cours desquelles il ne nous semble guère possible ni de fuir, ni de lutter, ne serait-ce que verbalement. Le respect de la hiérarchie et des conventions sociales se fait souvent par l’inhibition de l’action, source de la maladie en cas de stress intense ou durable. Pour éviter ce dernier, diverses voies ont été explorées. Pour David O’Hare, médecin et psychologue franco-canadien qui diffuse une technique de régulation émotionnelle commune sous le nom de cohérence cardiaque en Europe, celles-ci peuvent être regroupées en trois catégories, selon qu’elles font appel à la pensée, au comportement ou aux émotions. « La première regroupe les écoles dites de la pensée positive ou de la psychologie positive », indique le spécialiste. On connaît bien le pharmacien français Emile Coué qui au début de sa carrière, assortissait toujours la délivrance de médicaments d’une phrase encourageante : « Avec ce produit, vous irez chaque jour de mieux en mieux. » Devant le succès tant commercial que thérapeutique de ses affirmations, Emile Coué fonda la méthode qui porte son nom, consistant à répéter des affirmations positives progressives pour influencer l’état intérieur et la santé. Souvent tournée en ridicule, la méthode Coué est critiquée par nombre de psychologues qui considèrent qu’elle peut masquer un déni des émotions. « La pensée positive n’est pas forcément le ressenti », confirme David O’Hare. « Aujourd’hui, la psychologie positive s’efforce de susciter des émotions heureuses. » Lisa Bellinghausen, une chercheuse en psychologie cognitive à l’université Paris-Descartes a exploré les réponses des pompiers face au danger du feu. En l’absence de peur, il y a danger réel. S’il y a trop de peur, c’est soit la paralysie, soit l’action isolée avec une focalisation excessive.

Le remède de l’inhibition ? L’action !

La bonne peur, c’est celle qui stimule l’action coordonnée. Pour favoriser cette dernière, Lisa Bellinghausen a suggéré à ses stagiaires de prononcer des phrases rassurantes comme : « un feu finit toujours par s’éteindre » lorsqu’ils sentaient la paralysie venir. La méthode a montré une certaine efficacité. Or, si la pensée peut apaiser les émotions, il semble que l’action elle-même ait des vertus émotionnelles. Nelson Mandela représente le parfait exemple de ce mode de réponse au stress intense. Au cours de ses 27 ans de détention, il persista à se lever à 4 h du matin et à pratiquer quotidiennement des exercices physiques intensifs comme lorsqu’il était libre. Et alors que beaucoup s’écroulaient tant psychologiquement que physiquement, lui, est connu pour avoir gardé la tête haute, suscitant le respect de ses geôliers. Se maintenir dans l’action était pour lui une stratégie assumée de lutte… Donc de survie. Rien d’étonnant à ce que le héros national sud-africain ait dépassé les 90 ans en bonne santé… Pour le professeur Richard Wiseman, de l’Université du Herfordshire, cette capacité de se maintenir en action n’est pas réservée à des êtres exceptionnels mais peut être développée. Dans son ouvrage « Jetez-vous à l’eau », le psychologue britannique propose un ensemble d’exercices censés désinhiber le potentiel d’action sous forme de jeux. Dès le début de son ouvrage, il met au défi ses lecteurs de déchirer les premières pages sitôt lues et cumule les incitations à oser faire ce dont on se sent incapable ou que l’on croit inconvenant. À l’opposé de l’idée selon laquelle, pour améliorer sa vie, il faut changer d’abord sa manière de penser, Richard Wiseman se réfère à William James, un précurseur de la psychologie qui affirmait : « Si vous désirez une qualité, agissez comme si vous l’aviez déjà ». Autrement dit, il considère que le plus puissant remède à notre inhibition est… l’action elle-même ! Un avis en forme de lapalissade que ne contestera pas le père Michel Jaouen, un jésuite français aujourd’hui âgé de 93 ans, médiatisé par le magazine télévisé Thalassa pour avoir emmené des drogués en cure de désintoxication en mer sur un vieux gréement appelé Le Bel Espoir. Claude Kermoal, ancien mécanicien de bord qui avait alors 19 ans ,nous a relaté un épisode épique qui se déroula en 1972 lors d’une traversée de l’Atlantique avec plus d’une trentaine de personnes en cure de désintoxication. « Après quelques jours de navigation, le médecin de bord, Jean-Michel Saliou, harcelé par les drogués en manque qui lui réclamaient des substituts, les a rassemblés sur le pont. Il leur a montré une grande caisse contenant toutes les doses en leur annonçant qu’il allait toutes les leur distribuer et qu’ils les géreraient eux-mêmes durant les semaines à venir. Et au dernier moment, il a pris la caisse et l’a jetée à la mer ! Les gars voulaient le tuer. Il y a eu une bagarre générale ! Après le retour au calme, la suite du voyage a été extraordinaire. »
Démerdez-vous pour être heureux !
Le geste du médecin ne fut pas systématisé mais l’esprit resta. « En mer, il n’y a pas de possibilité d’évasion », résume Claude Kermoal. « C’est par l’action que les gens s’en sortent. » Aujourd’hui encore, l’association AJD fondée par les amis du père Jaouen affiche des taux de réinsertion sociale remarquables chez les anciens drogués et autres personnes en difficulté. « Sur ses deux bateaux, comme sur le chantier d’insertion, il y a une ambiance exceptionnelle de solidarité et de travail », affirme Claude Kermoal. L’aventure du père Jaouen, âgé aujourd’hui de 93 ans et (bien sûr) en pleine forme, est résumée par le titre d’un livre au nom plus parlant que bien des discours : « Démerdez-vous pour être heureux ! » Une lecture revigorante et… qui incite à l’action.
Dans la veine des thérapies actives, version tibétaine, Maurice Daubard, aujourd’hui âgé de 84 ans, enseigne le toumo ou yoga du froid lors de stages d’une semaine à 1800 mètres d’altitude entre février et mars. Au programme, marches matinales en raquettes et maillot de bain, méditation assise avec déshabillage progressif sous la neige et baignades dans un petit étang bordé de glace ! Les après-midi sont consacrées à un yoga plus classique mais néanmoins tonique. « Il ne s’agit pas d’exploit », indique Maurice Daubard, « mais de santé ! » Pour le yogi à l’allure de patriarche, le toumo est, certes, excellent pour le système immunitaire. Pour autant, il n’attribue pas la guérison de la tuberculose qui le tenaillait quand il avait dix-huit ans à ses seules baignades en eau froide, mais l’explique par cette métaphore : « J’étais poursuivi par les loups, alors j’ai couru pour les distancer. Aujourd’hui, qu’ils sont arrêtés depuis longtemps, je continue de courir. » L’adolescent chétif qui avait passé trois ans en sanatorium en vain est devenu un octogénaire vigoureux. Un exemple de guérison par le mouvement qui rappelle à s’y méprendre celle de l’indien BKS Iyengar, lui aussi guéri de la tuberculose par la pratique du yoga qu’il découvrit en 1934. À 95 ans, le fondateur de la méthode de yoga reconnue mondialement qui porte son nom continue sa pratique quotidienne. L’une de ses élèves, aujourd’hui professeure de yoga, se souvient des propos du maître : « Vous ne vous sentez pas bien ? Vous tournez dans votre tête ? À votre tapis de yoga ! ». Bien avant d’apporter la souplesse ou la force, le but des postures est de calmer le mental par la mobilisation du corps. Du point de vue occidental, piquer un 100 mètres ou faire du sport est connu pour avoir des vertus équivalentes. De nombreuses études ont ainsi montré que la pratique d’activités physiques améliore non seulement la résistance au stress mais également les facultés intellectuelles et par conséquent, l’ensemble des paramètres de santé.

Le contrôle par le souffle

Autre moyen millénaire pour apaiser l’esprit : la respiration C’est ainsi que le yoga inclut des exercices de pranayama, une discipline de contrôle du souffle que l’on aborde une fois acquise la maîtrise des postures. Au travers d’un large éventail de pratiques strictement codifiées, la maîtrise du souffle est considérée dans le yoga comme une voie royale du contrôle des émotions. Ce n’est qu’à partir des années 1990 que la science a mis en évidence par quel mécanisme le souffle contrôlait les émotions, ouvrant la voie à une pratique plus accessible : la cohérence cardiaque. Le docteur David O’Hare en explique les effets dans les termes suivants : « Tout comme nos émotions font accélérer ou ralentir le cœur, celui-ci possède lui-aussi le pouvoir de moduler les centres cérébraux émotionnels. C’est à ce niveau que la respiration peut exercer son influence. » Lorsque nous égalisons inspiration et expiration, le cœur se met à suivre : ses accélérations et ses décélérations s’harmonisent. Cet état, appelé cohérence cardiaque, harmonise les messages d’activation et de repos, induisant une régulation du métabolisme ainsi que de notre réaction aux agressions. La cohérence cardiaque favorise autant le repos et le lâcher prise en cas de tensions que l’action en cas d’inhibition. « Elle n’est pas un outil de relaxation visant à se créer une bulle de tranquillité hors du monde, mais nous rend plus adaptable aux différentes circonstances de la vie, qu’elles impliquent l’action ou l’immobilité. »

Exprimer vaut mieux que relativiser

Outre la respiration, un autre modulateur puissant des émotions perturbatrices semble être l’expression de ces dernières. C’est ce que montre une expérience menée à l’université de Californie par l’équipe du Dr Katerine Kircanski. Au cours de cette étude, des phobiques des araignées ont réussi à maîtriser leur peur, simplement en la verbalisant : 88 candidats devaient approcher le plus près possible d’une tarentule vivante dans un bocal ouvert. Puis les chercheurs ont demandé à une partie des sujets de décrire précisément les émotions ressenties au moment de l’expérience (je suis horrifié, etc.) et aux autres de relativiser ce moment stressant (« elle est plus petite que moi, elle ne peut pas me faire de mal »…). Une semaine plus tard, lors d’un second test, les sujets qui avaient exprimé leurs émotions sont allés plus près de l’araignée que les autres participants, et leur transpiration au niveau des mains était plus faible. Et plus les mots étaient négatifs, meilleures étaient les performances. De quoi relativiser l’effet de la relativisation ! « Il faudrait encourager tous les patients anxieux à verbaliser franchement leurs émotions », conclut Matthew Lieberman, un membre de l’équipe. C’est ce qu’impliquent les cercles de paroles désormais proposés aux patients cancéreux. Alors que l’on craignait que ces réunions entretiennent la négativité et le désespoir, on a constaté un taux de survie des malades amélioré chez les participants. L’expression et le partage d’émotions améliorent réellement la santé. L’expression semble également avoir une certaine efficacité face à la dépression. Julia Cameron, scénariste et écrivain qui a mis au point une méthode de développement de la créativité au départ destinée aux artistes et aux écrivains a constaté ses effets désinhibants sur d’autres catégories de personnes. La consigne centrale de sa méthode : réaliser chaque matin trois pages d’écriture automatique, sans enjeu et sans relecture. Philippe Monnier, un coach qui anime des ateliers d’écriture créative, témoigne de la guérison d’une dépression d’une de ses élèves par le seul fait de cette pratique : « Chaque matin elle écrivait que ça n’allait pas. Ce dialogue répétitif négatif a dû finir par lasser son cerveau ! Au bout de quelques temps, elle est passée à autre chose. Elle est sortie de la dépression ! »
Loin de se contredire, ces différentes voies semblent pouvoir se compléter, à condition qu’elles ne nous maintiennent pas en inhibition de l’action !

Un commentaire

  • Ronan Le Joncour dit :

    Cela devrait être une matière à part entière, enseignée à l’école.
    Le problème est que l’on ne pourrait organiser autant de contrôle sur les masses…

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