La vie est amusante. Avant-hier matin, je reçois un message un peu déprimant de Joseph Stutz, fidèle abonné de Néosanté mais surtout auteur d’un petit livre formidable (« Être bien ») dont je vous ai déjà dit beaucoup de bien. Dans ce courriel, l’écrivain suisse me met en copie un extrait du magazine Ma Santé, qui est un peu le Test-achats ou le 60 Millions de consommateurs de nos amis helvètes. Dans cet article intitulé « Stress & cancer : la fin d’un mythe », le journaliste conteste qu’il y ait le moindre lien, et certainement pas causal, entre le stress et le cancer, une maladie dont il attribue la cause à « la faute à pas de chance » (sic). Pour lui, le cancer n’a rien de psychosomatique, le stress n’en est pas un facteur déclenchant ni même aggravant, et la pensée positive ne peut nullement aider à en guérir. Tout ça relève de la croyance populaire et de la rumeur, circulez il n’y a rien à voir ! À sa décharge, le plumitif n’a pas sucé ces sottises de son pouce car pour appuyer son argumentaire démythifiant, il cite deux pontes de la cancérologie helvétique, l’un président de la fondation Recherche Suisse contre le Cancer et l’autre présidente de la Société suisse de psycho-oncologie. Ces deux sommités nient formellement que le psychisme puisse avoir la moindre influence sur les cellules cancéreuses. Tout juste admettent-elles que des individus stressés peuvent se fabriquer une tumeur en fumant, buvant et bâfrant davantage. Le reste ne serait que spéculations scientifiquement infondées.
Dans son mail, Joseph Stutz me suggère de réagir vigoureusement à cet article. Mais c’est plutôt le découragement que sa lecture m’inspire et qui me plombe mon lundi matin. Faudrait-il encore remettre l’ouvrage sur le métier ? Faudrait-il encore contester la vision officielle du cancer et tenter de la faire évoluer ? N’ai-je pas déjà maintes fois abordé ce sujet dans mon infolettre hebdomadaire et dans la revue Néosanté ? Cette dernière n’a-t-elle pas publié des dizaines de dossiers et d’interviews de médecins et chercheurs montrant au contraire les liens étroits entre le stress et le cancer ? Faudrait-il à nouveau préciser que toutes ces personnalités interrogées dans notre mensuel ont été précédées par d’illustres figures de la médecine comme le psychanalyste Georg Groddeck, le neurobiologiste Henri Laborit, le Dr Michel Moirot ou le Dr Ryke Geerd Hamer ? Et devrais-je signaler une nouvelle fois que le Dr David Khayat, le célébrissime cancérologue français, est aujourd’hui de nôtre côté puisqu’il est convaincu du lien entre les émotions négatives et l’apparition du cancer ? Dans la nuit de lundi à mardi, je me suis réveillé plusieurs fois en me demandant si je devais remonter au front et attaquer ce pitoyable torchon de désinformation Made in Switzerland. En me levant, je me posais encore la question. Mais en arrivant au bureau mardi matin, une sacrée surprise m’attendait ! Dans ma boîte de réception, j’ai en effet trouvé la dernière newsletter du Dr Julien Drouin, ce médecin marseillais que nous avons déjà interviewé deux fois (Néosanté n° 60, Néosanté n° 79), dont nous avons aussi publié plusieurs textes, et qui a été radié pour avoir affirmé publiquement la relation étroite entre le cancer et le vécu émotionnel et préconisé des approches thérapeutiques différentes. Dans son infolettre d’hier, Julien s’enthousiasmait justement d’avoir entendu le Pr Khayat la veille au micro de la radio RTL ! J’adore ces signes de l’univers qui se déguisent en coïncidences pour nous fournir une aide providentielle. En l’occurrence, je n’avais plus besoin de me mettre martel en tête puisque le cancérologue parisien a apporté le plus cinglant des démentis au magazine Ma Santé : pour lui, il ne fait plus de doute que le stress et le cancer sont aussi indissociables que le corps et l’esprit !
Ce n’est pas la première fois, disais-je, que David Khayat tient de pareils propos. Il y a deux ans, dans les pages du magazine Psychologies, l’auteur des « Chemins de l’espoir » avait déjà déclaré ceci : « En tant que cancérologue et homme de science, je vous dirais qu’à ce jour, aucun lien entre stress et cancer n’est démontré. Il faut donc persévérer et mettre en place de vraies études, sérieuses, contrôlées. Mais en tant qu’honnête homme, je vous dirais aussi que, après avoir accompagné pendant 35 ans des milliers de personnes, je n’ai pu m’empêcher de constater l’existence d’un drame psychologique dans les années qui précédaient l’apparition d’un cancer chez la plupart de mes patients ». En réalité, ces lignes étaient déjà écrites dans le livre « Prévenir le cancer : ça dépend aussi de vous » que le professeur a publié en 2014. Depuis lors, le chef du service d’oncologie de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière ne s’est pas renié et a confirmé plusieurs fois sa « conversion » à l’hypothèse psychosomatique sur la genèse du cancer. Aujourd’hui, Khayat achève son chemin de Damas et il publie un nouveau livre intitulé « L’enquête vérité. Vous n’aurez plus jamais peur du cancer », dans lequel il étaie son intuition par des références d’études scientifiques. Dans ce nouvel opus qui lui a valu les honneurs matinaux d’RTL, le médecin des stars et star lui-même expose en effet les fruits de ce qu’il appelle une enquête : il s’est plongé dans la littérature médicale et il y a trouvé quantité de données montrant que le stress et la détresse psycho-émotionnelle favorisent bel et bien le cancer. Non seulement les chocs psychiques le favorisent, mais ils en sont les éléments déclencheurs ! Ce qui est assez curieux, c’est que le distingué professeur ne confesse pas s’être trompé il y a quatre ans en déplorant un manque de preuves sérieuses. S’il avait lu Néosanté et lu les livres qui y étaient présentés (ceux d’Yvane Wiart et de Gustave-Nicolas Fischer, notamment), il aurait vu que les recherches probantes étaient déjà bien là, disponibles, nombreuses et plus anciennes que son avant-dernier bouquin. Mais soit. Il est déjà très réjouissant que le plus célèbre cancérologue de France ait « viré sa cuti » et qu’il invite aujourd’hui les gens à ne plus considérer le cancer comme une fatalité ni comme une maladie dénuée d’intelligence. C’est pourquoi je rejoins Julien Drouin et partage volontiers la vidéo de ce grand moment radiophonique. Pour la visionner, cliquez ici.
Certes, comme dit Julien, Khayat réinvente l’eau chaude et fait mine de défricher une terre déjà labourée depuis des lustres, voire depuis un siècle. Il ne semble toujours pas connaître les travaux précurseurs de Groddeck, Moirot, Laborit et Hamer. Il persiste à voir dans le cancer un odieux criminel qui veut tuer le malade en le « suicidant » lorsque le stress devient trop grand. Il maintient donc sa pleine confiance dans les traitements qui veulent tuer le tueur et lutter belliqueusement contre le fléau. Il n’allait quand même pas remettre en cause le business qui a fait sa gloire et sa fortune ! À longueur de chroniques et d’interviews, il continue de vanter les prétendues victoires curatives de la médecine classique. Et il ne s’étonne pas que l’Institut National du Cancer, dont il est le père fondateur, ne recense toujours pas le stress parmi les neuf principaux facteurs cancérigènes. On peut aussi soupçonner Khayat de surfer sur une tendance « psy » et de s’approprier les mérites d’autrui, comme il l’a fait naguère en publiant « Le vrai régime anticancer », sorte de réplique jalouse du livre « Anticancer » de David Servan-Schreiber. Il n’empêche que son virage à 180° ne passe pas inaperçu et que c’est un tournant important pour la cancérologie orthodoxe. Dorénavant, il sera clair que les détracteurs de la nouvelle médecine du sens sont en infraction avec la pensée d’un de leurs maîtres ! Aussi suis-je d’accord avec Julien Drouin : ne boudons pas notre bonheur et marquons d’une pierre blanche ce lundi 17 septembre 2018 qui a vu David Khayat bousculer le dogme actuel en déclarant haut et fort que « nous sommes notre meilleur anticancer » puisque « nous sommes nos cellules ». M’est avis que dans le futur, les historiens de la médecine retiendront peut-être cette date comme le point de basculement de l’ancien vers le nouveau paradigme. C’est à la fois mon pressentiment et mon vœu le plus ardent.